cinema da non perdere - Ismaele
Dans un petit
village de Normandie, Paul Braconnier ne peut plus supporter sa femme,
alcoolique et odieuse qui le lui rend bien. Chacun projette de tuer l'autre… La
poison est d'abord
une petite merveille d'écriture : le scénario est simple, reposant une idée
brillante et même plausible. Sacha Guitry a écrit là une superbe variation du
crime parfait. C'est aussi une petite merveille d'interprétation : Michel Simon
joue avec un naturel et une expressivité rare. Quand on sait que le
film a été tourné en onze (oui, onze!) jours, Michel Simon ayant demandé à
Guitry de faire le moins possible de deuxièmes prises(!), on n'en est que plus
admiratif. Enfin, c'est aussi
une petite merveille d'humour noir qui s'amplifie au fur et à mesure que le
film avance et dont l'apothéose est le procès final, jubilatoire.
…Le tournage du film ne
dura en conséquence que 11 jours, que le comédien décrira des années plus tard
comme « le meilleur souvenir de sa
carrière. » Malgré tout, le douziime jour, l’équipe fut réunie
à nouveau pour un prologue, resté célèbre, où le cinéaste apparaît saluant un à
un tous les artisans de la réussite de son film, signant en particulier une
dédicace formidablement élogieuse à l'endroit de son comédien principal (image
ci-contre à gauche).,,
…”La Poison” ne
se contente pas d’être un pamphlet quasiment anarchiste sur les systèmes
judiciaires humains, et en particulier sur l’intégration de la morale à la
justice (Braconnier lâchant à son avocat, à propos des procureurs et des
juges : « Comme ils sont hypocrites !
») : c’est également une satire assez mordante sur la France profonde de
l’après-guerre, celle des petits villages où le "tout le monde connaît
tout le monde" n’est jamais loin du "tout le monde médit de tout le
monde"…
…Sacha Guitry aura donc
trouvé dans ”La Poison” son
ton nouveau, un ton unique, sans cesse magnifié par cet esprit incomparable qui
fait de lui l’un des plus (sinon le plus) plaisant(s) des dialoguistes
français. Car on pourrait louer à l’infini l’élégance inouïe de cette plume,
ici trempée dans le vitriol, qui sait pondre les aphorismes et les répliques
comme une couveuse de gala, et qui triomphe dans une plaidoirie finale
prodigieuse de finesse et d’amoralité…
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